Dans cet étonnant récit d'anticipation publié en 1844, et recueilli dans les Soirées de l'orchestre (1852), l'histoire de la trahison d'une femme et de la vengeance diabolique qui s'en suit, se combine avec la description d'une cité du futur, où rien n'existe qu'en fonction de la musique.
« Euphonia est probablement la nouvelle qui permet le mieux de voir l’originalité de Berlioz conteur romantique et comment s’opère chez lui la jonction entre langage musical et langage littéraire. C’est justement dans cette nouvelle qui est la plus romantique par le débordement de l’imagination, le refus des limites, l’excès, l’ironie et le tragique, que Berlioz parvient enfin à faire éclater les cloisonnements, les dichotomies musicien-écrivain. Il y écrit, grâce à son art de conteur, cette musique de l’avenir, cette musique-fiction que les conventions, les habitudes des exécutants et du public de son temps ne lui permettent de réaliser complètement que dans le domaine du fantastique. » (Béatrice Didier, « Hector Berlioz et l’art de la nouvelle », Romantisme n°12, 1976)
Table des matières
Notice sur l’auteur - Euphonia ou la ville musicale. Nouvelle de l’avenir - Notes de l’éditeur - Notice sur le texte - Extraits critiques - Bibliographie.
Hector Berlioz
Hector Berlioz (La Côte-Saint-André, Isère, 1803 – Paris, 1869). « Hector Berlioz nous paraît former, avec Victor Hugo et Eugène Delacroix, la trinité de l’art romantique », écrivait Théophile Gautier en 1870. Ce musicien de génie disposait également d’un talent d’écrivain exceptionnel, il a d’ailleurs en grande partie vécu de sa plume. Ses chroniques musicales sont « des chefs-d’œuvre par le style autant que par la pénétration du jugement. À chaque page de son immense correspondance et de ses Mémoires (1870) éclatent cette vigueur d’expression et cette verve qui achèvent le portrait d’un personnage de haute culture et de grand caractère. » (Henry Barraud, 1968). Son œuvre littéraire se compose de critiques musicales et de nouvelles parues dans divers périodiques et recueillies en partie dans trois volumes : Les Soirées de l'orchestre (1852), Les Grotesques de la musique et À travers chants (1862). « On peut en effet voir en lui le romantique par excellence, non seulement par les thèmes de son inspiration mais également par le caractère tumultueux de son existence. – Projetant avec violence son propre “ je ” sur le devant de la scène, “ L’impudique geste autobiographique ” comme le dit joliment Pierre Boulez ; unissant la littérature, voire ses propres textes, à la musique jusqu’à ce que celle-là devienne le motif de celle-ci ; concevant la musique comme une théâtralité ; taisant appel de manière explicite au “ fantastique ” ; privilégiant l’irrationnel et l’imaginaire sur le rationnel et le formel ; remettant en question le matériau sonore lui-même. Hector Berlioz est bien l’exemple même du romantique. » (Brigitte et Jean Massin).
Presse
Cette brève nouvelle, qui fait partie des Soirées de l’orchestre, et fut publiée en 1852 ravira tous ceux qui adorent le Berlioz des Mémoires : elle est toute bizarre, violente, réjouie, improbable, et sait lier, dans un même élan, deux des grandes obsessions de Berlioz, la fidélité à une certaine idée de la musique, et l’impossible fidélité des femmes. Nouvelle fantastique, Euphonia suppose une cité idéale, quoique sous régime militaire, qui ne serait consacrée qu’à la musique. Mais, c’est l’histoire Berlioz-Camille Pleyel, mais c’est la Viardot chantant avec appoggiature puis avec simplicité l’Orfeo, mais ce sont toutes les batailles et les fureurs de Berlioz qui énervent cette petite fable, et qui l’élèvent à la séduction convulsive d’une confidence.
Évelyne Pieiller (Magazine littéraire, 1992)