Pour Akiloë, le jeune indien Wayana qui se baigne dans le fleuve, au cœur d’une réserve dans la forêt amazonienne, l’univers des blancs ne s’exprime qu’à travers la voix du transistor de radio Paramaribo ou dans les reflets d’aluminium des ustensiles de cuisine qui s’empilent comme des totems divins sous les “carbets”, ces fragiles habitations des Indiens de Guyane. Son avenir semble dicté par l’esprit des arbres et du fleuve, par le “souffle de la forêt”. Passer de l’âge de pierre à celui d’Ariane en assimilant la culture républicaine devient alors un parcours initiatique d’une singulière complexité dont le jeune Indien triomphe peu à peu. Le parcours original d’un enfant qui sera formé par une jeune institutrice à l’âme de missionnaire, adopté par un réfugié polonais restaurateur et physicien, avant de s’élever vers le ciel: Akiloë sera sauteur à la perche avant de passer toutes les épreuves pour devenir astronaute. Jusqu’au jour où il s’envolera enfin pour l’espace, porté par le souffle de la forêt.
Quels effets “l’éducation occidentale” peuvent produire sur un enfant surdoué, fort imaginatif, dont la culture originelle n’a pas été définitivement fixée par l’expérience ? Tel est le thème de ce roman nourri d’émotion où les éléments du savoir sont soumis au filtre d’une sensualité native, celle d’un habitant de la forêt. Philippe Curval a su trouver la fraîcheur inventive de l’imagination indienne pour écrire une fable cruelle et magique, celle des tribus amazoniennes face à l’invasion de la civilisation blanche, dans le décor déconcertant d’une Guyane confrontée à l’oubli d’un passé peu glorieux, à ses contradictions économiques, sociales, raciales, juste au moment où l’avenir spatial s’affirme sur son territoire.
Couronnée par de nombreux prix, son oeuvre comporte des classiques de science-fi ction (Cette chère humanité, parue en 1975). La Volte a publié un recueil de nouvelles fantastiques L’homme qui s’arrêta (2009), un roman Juste à temps (2013). Philippe Curval partage son temps entre Paris et la baie de Somme. Akiloë ou le souffle de la forêt est un roman fort éloigné des codes de scince-fiction. Un premier Akiloë est paru lors de la rentrée littéraire de 1988 chez Flammarion (porté par Françoise Verny), ce roman était alors moins de la moitié de la version d’aujourd’hui.