Situé à bonne distance de la Terre, entre Mars et Jupiter, l'astéroïde Pallas (qui existe bel et bien, vous pouvez vérifier) est peuplé d'êtres étranges : le corps caoutchouteux, munis d'une ventouse et d'yeux télescopiques, les Pallasiens se nourrissent de champignons via leur épiderme, se déplacent grâce à un système de rubans-roulants et fument de « l'herbe à bulles ». Paisible jusque-là, leur vie se voit bouleversée par le projet d'un visionnaire nommé Lesabéndio. Pour percer le nuage qui entoure leur astre, leur apportant la lumière mais en leur occultant l'au-delà, le Pallasien envisage la construction d'une immense tour. L'érection de celle-ci aura des conséquences insoupçonnées. A la fois fable écologique et utopique, explorant avec acuité et facétie les accords et désaccords de la technique et de l'esthétique, de la raison et de la mystique, questionnant la place de l'individu dans tout processus collectif, dénouant les fils de nos désirs les plus démesurés et de nos peurs les plus tenaces, Lesabéndio, le chef-d'oeuvre de Paul Scheerbart écrit à l'orée de la première guerre mondiale et que Walter Benjamin tenait en haute estime, demeure l'une des grandes oeuvres prophétiques de notre temps. Notre existence sur Pallas est elle-même si étonnante, que nous pouvons raisonnablement espérer être les témoins de prodiges plus grands encore.